Mission en Sicile

En mission en Sicile, Pascal est parti à la rencontre de nos producteurs pour découvrir d’où viennent leurs produits et comment ils travaillent afin d’adapter notre manière de travailler et mieux vous informer en magasin.

JOUR 1

Rencontre avec Luigi Grilo et Agata

Luigi, Agata et Antoine habitent dans la campagne de Syracuse. Entres les murs de pierres sèches, poussent des oliviers, des amandiers et des caroubiers.

Beaucoup de champs restent cependant à l’abandon. La relève agricole est loin d’être assurée ! Les agriculteurs vivent principalement en ville et vont travailler à la campagne dans cette région. Cela pose donc des soucis car le paysage est souvent laissé à l’abandon.

Luigi et Agata, eux, ont décidé d’aller à contre-courant puisqu’ils déménagent bientôt près de leurs champs pour y cultiver des herbes aromatiques. Après une longue observation de leurs champs, ils ont remarqué que la végétation spontanée était composée d’une quarantaine d’espèces dont les plantes aromatiques. Ils ont donc décidé de ré-implanter du thym, de la sauge, de la lavande, du romarin sur leurs parcelles de 6 ha et de laisser pousser entre les rangs la végétation spontanée (une myriade de fleurs ou les insectes bourdonnent).

Leur production consiste donc à effeuiller ces plantes aromatiques pour les distribuer en vrac (pour les tisanes ou pour assaisonner nos plats avec de l’origan, du thym, du romarin) et aussi pour produire des huiles essentielles.

Allez savoir si prochainement, nous ne proposerons pas des épices en vrac et si ces huiles essentielles ou le résidus du processus ne se retrouveront pas dans nos shampoings!

Mais est-il cohérent pour Les Petits Producteurs de proposer des produits de Sicile ?

C’est bien connu, le comportement alimentaire le plus écologique est la consommation de fruits et légumes locaux de saison. Mais que manger lorsque les producteurs locaux n’ont pas (ou que très peu) de produits de saison à proposer ?

En réalité, il est bien plus écologique, à la fin de l’hiver, de consommer des tomates bio importées de Sicile que des tomates belges « forcées » en serres chauffées.

En effet, d’après les conclusions d’un rapport de l’Association Nationale de Producteurs Fermiers ASBL pour Bruxelles Environnement (2009), l’impact écologique de fruits et légumes européens importés par camion est de 5 à 20 fois plus petit que celui de fruits et légumes hors-saison cultivés en Belgique en serre chauffée aux énergies fossiles.

Mais il n’y a pas que le bilan carbone. Il est de l’intérêt des producteurs locaux que les consommateurs restent fidèles toute l’année aux magasins LPP (grâce à une offre diversifiée), de sorte qu’à la belle saison ces derniers soient en mesure d’écouler un maximum de bons produits locaux, aux conditions les plus avantageuses possibles pour les producteurs et pour les consommateurs.

JOUR 2

En transit…

Comme dans beaucoup de campagnes européennes, la main d’œuvre locale se fait rare. Luigi, le petit producteur d’aromates, a engagé 3 migrants venus de Guinée et du Mali. Fait trop rare, ils ont tous les trois un permis de travail, un contrat et un salaire aligné sur les Siciliens… Mais pour une durée limitée, faute de travail sur toute la saison.

Et si nos trois travailleurs rejoignaient nos producteurs liégeois à la fin de la campagne sicilienne… ? Histoire d’éviter à trois jeunes motivés d’errer dans les campagnes européennes, Agata et moi-même allons analyser cela dès que possible. L’absence de politique d’intégration à l’échelle européenne risque de nous refroidir mais cela en vaut la peine, non ?

Dans les rues de Cassibile, des centaines de jeunes africains arpentent dignement les rues de cette petite ville. Guinéen, Soudanais, Malien, Tchadien. Tous sont migrants. La plupart vivent dans des campements insalubres faits de « bric et de broc ». Nous en prenons deux en stop. L’un vient du Soudan, l’autre du Tchad. Ils ont à peine 20 ans et sont arrivés par bateau après plusieurs tentatives de la traversée de la Méditerranée. Selon eux, ils sont arrivés à une situation momentanément plus enviable, disent-ils. Nous les déposons à la commune pour ces éternelles histoires de « papier »… Ces jeunes clandestins seront-ils expulsés ? Vont-ils enfin avoir un permis de travail ? … Sinistre mystère.

La confiance…

Longue soirée avec E., inspecteur pour un organisme de contrôle BIO dans le sud de la Sicile. Homme intègre et précurseur, il nous raconte qu’il a stoppé ce dernier mois 8 agriculteurs qui fraudaient la règlementation européenne sur l’Agriculture Biologique. À son grand désarroi, il nous dit que les sanctions opérées par l’Etat Italien sont bien trop gentilles à l’égards des fraudeurs. Le business autour de l’agriculture bio devient tel qu’il nous avoue qu’il est très pessimiste pour l’avenir. Selon lui, la seule solution pour avoir une totale confiance sur les produits bios sicilien est de court-circuiter l’approvisionnement massif via les circuits de distribution classique (grande distribution). Travailler avec des petites structures familiales et rencontrer les producteurs est nécessaire. Les petits producteurs comme Luigi ou comme la coopérative Valdibella sont vraiment dignes de confiance… OUF.

Si certains de nos Liégeois achètent leurs agrumes via des GAC par « Galline Felici », continuez, notre ami E., notre inspecteur (!), fournit cette association en citrons notamment. Ils sont sérieux et paient très correctement leurs producteurs. Bon à savoir !

Et la mafia dans tout cela, me direz-vous ?

L’histoire raconte qu’il y a un an, une manifestation de plus de 1000 personnes se réunissait chaque année pour dire : « Non à la mafia qui gangrène l’île ». L’actuel interlocuteur politique de la Sicile (j’ai oublié son nom) était dans la manifestation. Il rentre dans un bar inondé par la foule et commande un café.

Il dit au barman : « Vous avez vu l’ampleur de cette manifestation anti-mafia ? »
Le barman : « Quelle manifestation ? »
L’homme politique, stoïque, s’en va et dit au-revoir.
Le barman : « et le café ? Vous l’avez bu et vous avez oublié de le payé ! »
L’homme politique se retourne : « Quel café ? »

C’est aussi cela la mafia et la Sicile…

JOUR 3

Un jour peut-être à Sainte-Walburge?

JOUR 4

Vin de Valdibella

À 45 minutes au sud de Palerme trône le village de Camporeale, le cœur de l’histoire de la Coopérative Valdibella. L’endroit est magnifique. Ici, la large vallée coincée entre les petites montagnes est ondulée et vit au rythme de la campagne avec essentiellement ses blés anciens, ses vignes et ses petits hameaux désuets.

Vue de Camporeale

Valdibella regroupe à Camporeale 5 agriculteurs qui cultivent ensemble +/- 50 hectares de vignes. A raison de +/- 5.000 litres/hectare… Vous aurez fait le calcul de leur production annuelle.

Rencontre avec Nino et Katia

Le territoire étant vaste, les sols sont assez variés sur ce plateau en forme de tôle ondulée. Les cépages typiquement siciliens alternent en fonction de la nature du sol. Une des forces de la coopérative est d’avoir fait de la ferme de Massimiliano Solano (un des 4 fondateurs de la coopérative) une forme de laboratoire expérimental au profit des autres producteurs.

Même si le BIO est peu consommé dans le pays, les fondateurs de Valdibella ont des idées fortes. Ils veulent limiter au maximum les pulvérisations de cuivre et de soufre (seuls produits autorisés en BIO sur les vignes) et augmenter la biodiversité à l’échelle de la ferme afin de mieux réguler l’équilibre écologique de la vigne et ainsi diminuer l’impact des maladies. Nino, le vigneron qui encadre nos 5 agriculteurs, me raconte qu’à l’exception du passage entre les lignes par le tracteur pour maîtriser les mauvaises herbes entre les rangs des vignes, tout est manuel (du travail du pied à l’enlèvement des feuilles malades jusqu’aux vendanges de septembre). Une des conséquences pour les agriculteurs d’une telle stratégie est la diminution des rendements et une augmentation de la qualité. Valdibella paie donc ses raisins proportionnellement plus chers que les autres agriculteurs de la région.

Ici, on produit 55% de rouge (principalement le cépage Nero d’Avola) et 45% de blanc (principalement les cépages Grillo et Catarratto).

Outre l’histoire des vignes, c’est l’histoire du père Montalbano qui est touchante. Guiseppe Montalbano étant un fervent défenseur de la liberté et critiquait ouvertement le racket exercé par la mafia et les conséquences sur l’économie de l’île. Il fut tué dans sa ferme il y a quelques années. Depuis, un mémorial trône dans la ferme et le fils a créé une petite association qui sensibilise les enfants dans les écoles…

Et les sulfites dans tout cela ?

Nino explique que les raisins sont récoltés à la main et placé dans des caisses de 15kg que l’on amène directement au chai. Ils évitent donc l’entreposage des raisins en vrac qui abîment les grains. Cela engendre un jus dans le fond et provoque une oxydation qu’il faut maîtriser par un ajout supplémentaire de sulfites. Donc, ici, la politique est à la diminution massive de l’usage des sulfites, voire « zéro sulfites » pour certaines productions.

La dégustation

J’ai pré-sélectionné quelques vins pour vous. Néanmoins, les décisions sont toujours un peu arbitraires. Avec l’équipe, nous allons voir si des dégustations collectives avec nos clients sont possibles afin que vous sélectionniez vous-mêmes les vins du magasin!

L’organizationnnnneeeeeeeeeeeee

Équipe logistique

Je vous présente Giusi, Pietro, Guiseppe et Catia. Ces 4 personnes sont responsables de la préparation de nos palettes mais aussi de la fabrication d’une série de produits transformés comme les fameuses sauces tomates et pâtes d’amandes.
Nos quelques producteurs récoltent d’habitude leurs fruits et légumes dans de grandes caisses en plastiques, qui sont acheminés jusqu’au mini centre logistique. Ensuite, Pietro, lors de la réception de nos fruits et légumes, retrie avec son équipe tous les fruits et légumes et les replace dans les caisses en cartons que vous trouvez en début de magasin.

JOUR 5

Alessandro, l’enseignant en grec et latin, producteur de patates douce et d’oignons

Salvatore – Valdibella

Alessandro, c’est un peu un cas particulier dans la sphère des producteurs de la coopérative Valdibella. En effet, Salvatore est agriculteur à mi-temps et enseignant en grec et latin à l’école secondaire de la région. Néo-agriculteur depuis 4 ans, Salvator cultive dans les sols sableux principalement des patates douces et des oignons.

Localisé le long de la Méditerranée près de Menfi, sur la pointe sud-ouest de la Sicile, je m’attendais à avoir plus de précocité vu les températures et la proximité de la mer mais Salvatore me raconte que justement, il doit attendre la fin avril quand le vent du sud retombe un peu sinon le vent peut « abîmer » les légumes.

Les patates douces seront avec Alessandro plutôt de couleur clair et pas orange. En discutant avec Alessandro et Laura, son épouse, ils nous disent que les patates douces de couleur orange sont très sucrées et eux, ils préfèrent des patates douces plus douces… logique !

JOUR 6

Walter, notre contact chez Valdibella, et Vittorio (avec la casquette), le producteur de raisins

Les fruits et légumes

Vittorio Lauria et sa famille cultivent vers Comiso (près de Syracuse, dans le sud-est de la Sicile). Avec près de 70ha répartis sur plusieurs parcelles, Vittorio et son équipe cultivent donc en bio depuis peu et proposent la panoplie des légumes du sud (courgettes, tomates, aubergines, poivrons) mais ce sera aussi notre producteur principal de raisins de table.

La plupart des produits sont cultivés soit sous serre froide (c’est-à-dire en plastique) mais surtout sous voile afin d’éviter le maximum des dégâts des orages et pour limiter les maladies venant des insectes. Nous sommes clairement en partenariat avec des grands professionnels qui permettent un soutien réel à l’emploi local.

Pascal

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